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24 mars 2006 5 24 /03 /mars /2006 17:49

Une telle mobilisation, juste contre le CPE, semble disproportionnée. Et si ce n’était que le révélateur du malaise profond et de l’angoisse de nombreux jeunes ? En 1968, les jeunes désiraient fondamentalement pouvoir s’exprimer et prendre des responsabilités. L’intuition de départ, légitime et nécessaire, a été détournée et s’est finalement retournée contre la jeunesse. L’autorité, les institutions, le savoir, la famille…ont été fragilisées. A un monde relativement sécurisant et stable s’est substitué un monde flou, incertain, sans repères stables.

Je ne prétends pas tout expliquer, mais je crois que la fragilité de certaines familles, qui entraîne la fragilité de certains jeunes, éclaire en partie la situation actuelle.

La confiance, c’est ce qui manque à beaucoup de jeunes. Pour avoir confiance en soi, et donc dans l’avenir, il faut se sentir aimé. Je me sens aimé lorsque mes parents s’intéressent à moi,  me tracent un chemin,  s’aiment entre eux dans la durée, prennent du temps pour moi, me parlent, m’encouragent, me relèvent, m’aident à me construire, me transmettent l’espérance, donnent un sens à ma vie et m’orientent vers le vrai, le beau et le bien … Dans ces conditions, je peux surmonter les difficultés et me projeter dans l’avenir, fort de ma structuration intérieure et conscient de ma force et de ma faiblesse.

Or, de nombreux jeunes souffrent de la séparation de leurs parents, de leur absence, de leur effacement, de leur incapacité à les construire et à donner un sens à leur vie. Ce dernier point est essentiel. Plus le sens donné dépasse l’horizon matériel, plus il rend le jeune capable d’accepter l’inconfort et la précarité.

Le domaine éducatif est également responsable du trouble actuel. En fragilisant l’autorité et  les institutions, nous avons conforté l’inquiétude des jeunes. Ils ne peuvent plus s’appuyer sur l’adulte qui ne constitue plus un repère. En refusant de leur transmettre le monde (l’héritage de tous ceux qui nous ont précédés), nous leurs refusons les repères nécessaires pour se construire. En les plaçant sur le même pied d’égalité que l’adulte, nous les livrons à eux-mêmes. Ils deviennent leur propre référence, ce qui est très angoissant. En consacrant « le plaisir » comme mode d’apprentissage, nous les empêchons d’apprendre à faire effort. En refusant de développer leurs talents particuliers, dans un  système scolaire uniforme qui privilégie le groupe, nous les conduisons à l’impasse. Enfin en leur refusant l’accès à la compréhension du sens des textes  et en les coupant de la production littéraire des siècles passés, nous engendrons une frustration profonde qui pour certains s’exprime de manière violente. L’école qui éduque plus qu’elle instruit ne fait qu’affaiblir le rôle éducatif qui revient naturellement au cercle familial.

L’urgence consiste à redonner confiance à ces jeunes qui déversent leur angoisse dans nos rues. Permettre à la famille d’être ce lieu où l’enfant se sent aimé,  se construit et donne un sens à sa vie. Encourager les familles à accueillir de nombreux enfants, signe d’une grande confiance dans l’avenir. Un peuple qui vieillit offre peu de place et d’avenir pour sa jeunesse. L’école doit devenir ce lieu où l’enfant structure son intelligence et se nourrit de la pensée de ceux qui nous ont précédés. Elle doit permettre à chacun de développer ses talents en proposant des formations et des parcours diversifiés. Fondamentalement, car tout se joue à ce niveau là, chacun (père, mère, homme politique, chef d’entreprise, chacun à sa place) doit se poser la question de savoir quel acte concret de générosité, quel effort il peut faire pour redonner confiance aux jeunes dont il est responsable.

* Utilisation de méthodes de lectures inadaptées et absence d’analyse de textes.

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